Édition 2023

Lauréate du Prix Women in Motion 2023

Rosângela Rennó

Sur les ruines de la photographie

« [La photographie] comme un organisme vivant, elle naît à même les grains d’argent qui germent, elle s’épanouit un moment, puis vieillit. Attaquée par la lumière, l’humidité, elle pâlit, s’exténue, disparaît… » – Roland Barthes

La photographie, comme un organisme vivant, doit mourir. Témoin fiable, mais impermanent, elle invite les êtres humains à faire fi de la durée, comme affect et comme symbole.

La disparition – la mort – hante, tenace, l’œuvre de Rosângela Rennó. L’artiste collectionne des images de différentes époques et espaces ; procède à leur montage et remontage, gomme des identités, superpose des vélatures. Les photographies reviennent du passé, ruinées, affaiblies, car leur vie jamais n’est pleinement restaurée ; témoins amaigris, elles attendent un avenir inexistant et signalent un passé interminable.

Des trames d’impression de couleurs augmentées floutent corps et visages (Corps de l’âme [Corpo da Alma] 2003-2009) ; des gestes sophistiqués et ironiques manipulant encre, ciseaux, colle, papier, ébranlent les topos des portraits de mariage (Noces [Nuptias] 2017). Les bustes du musée d’anthropologie de Las Palmas se fondent dans le faux marbre du papier marbré (Êtres uniques du monde [Seres notáveis do mundo] 2014-2021). Glanées sur le net, les photos amateurs des monuments à Lénine, exaltés, détruits ou déplacés après la chute de l’URSS, intègrent une chaîne de commentaires manuscrits, de lieux et de vides. Iconolâtrie et iconoclasme se succèdent par intervalles évoquant aussi la mort des statues (Bonnes pommes/Pommes pourries [Good Apples/Bad Apples] 2019).

Individus, populations, religions, rituels, mots, livres, souvenirs, monuments, tout s’en va... Même la photographie, telle que nous la connaissons depuis le XIXe, a disparu. Souvenirs : lumière rouge du laboratoire, naissance imprécise de l’image dans le révélateur...

Avec la photographie analogique, ont également disparu le temps, l’attente retardée, l’émergence lente de l’image, le témoin précis. Les œuvres de Rosângela Rennó, baignées de temps et de traces, extraient d’un flux infini les images qu’elles nous révèlent dans l’instant incomplet.

Maria Angélica Melendi


ROSÁNGELA RENNÓ, LAURÉATE DU PRIX WOMEN IN MOTION EN 2023 
Le 4 juillet 2023, Kering et les Rencontres d’Arles remettront à Rosàngela Rennó le Prix Women In Motion au théâtre Antique d’Arles. Ce prix vient saluer la carri.re d’une photographe remarquable et a précédemment été décerné à Susan Meiselas (2019), Sabine Weiss (2020), Liz Johnson Artur (2021) et Babette Mangolte (2022).

Avec la collaboration de la galerie Mor Charpentier, Paris.

Avec le soutien de Kering | Women In Motion.

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